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Anorexie, boulimie... image du corps, douleur de l'âme
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24 novembre 2007

La crise... les crises... la boulimie...

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Il n’est pas de meilleure façon d’aborder la boulimie je pense que de simplement faire le récit d’une journée, une journée malheureusement très semblable à toutes les autres, car cette maladie s’inscrit dans le quotidien, dans tous les instants de ma vie, jour et même nuit.

Comment commence une journée ? Vous ne vous êtes peut-être jamais attardé sur la question mais quand on souffre de boulimie, on ne le sait que trop : le petit déjeuner. Tout le monde s’y attèle sereinement, machinalement, généralement avec plaisir mais pour moi c’est déjà le début du cauchemar quotidien. Commencer, ne pas commencer, risquer de ne pas pouvoir s’arrêter, maîtriser, succomber, tout devient soudainement déjà trop compliqué. Et puis finalement les résolutions de la veille sont vite oubliées. Je m’étais promis de ne rien avaler mais l’angoisse me gagne à l’approche du réfrigérateur et je sens que j’ai déjà du mal à me canaliser. Que vais-je trouver dans ce maudit réfrigérateur ? Je ne me souviens plus de tout ce que j’ai avalé hier soir alors difficile pour moi d’établir un inventaire. Et s’il ne restait plus rien ? Mon cœur s’emballe rien qu’au toucher de la poignée. Un coup d’œil rapide sur son contenu, étagère après étagère je ne peux m’empêcher de déjà faire des associations insensées. Le temps de la réflexion est bien court et c’est sans même m’en rendre vraiment compte que je commence à saisir ce qui constituera ma première bouchée. Je ne sens pas le goût de ce que j’avale, c’est mauvais signe, signe que je viens de mettre le pied dans l’engrenage. J’enchaîne les aliments les uns après les autres, déchirant avec frénésie ces emballages qui m’énervent et ne font que retarder l’ingurgitation. Pas le temps de jeter tous ces papiers à la poubelle ou de réfléchir à un quelconque ordre, il faut aller vite, très vite. Je mâche à peine. Au fur et à mesure que le stock diminue l’angoisse me gagne et je commence à échafauder les plans pour la suite. Après le réfrigérateur je passe aux placards et étagères que j’ai pris le soin de remplir. Je sais qu’il ne restera rien. Cela rajoute à mon angoisse car je sais que ma boulimie sera alors visible, que je ne pourrai pas la cacher. Je passe ensuite à mes provisions cachées. Tout un art de dissimuler ces denrées, trop faciles à trouver ! Il ne reste plus rien, plus rien que l’envie de pleurer, mais ça attendra car je n’ai pas fini. Le rythme freinant, la culpabilité me gagne. Comment ai-je pu ? Je me dégoûte. L’écœurement physique et moral convergent. Alors que je viens d’user de tous les stratagèmes pour me remplir le plus rapidement possible je n’ai maintenant qu’une obsession, me vider, rapidement aussi, avant qu’il soit trop tard, que tous ces aliments prennent place dans mon corps après avoir quitté mon tube digestif. Je ne sais que trop bien où ils préfèreront se loger. Direction les wc où je vais passer un bon moment à essayer tant bien que mal de me purger, de me laver, de me vider. Ça fait mal, bien fait pour moi, il faut bien que j’en paie le prix. Une méthode puis une autre, tout doit être tenté. Marchera, marchera pas - finalement ne marche pas. Il n’est pas 10h que je suis déjà épuisée. Il me faut maintenant me préparer. La salle de bains, confrontation avec les miroirs et la balance, toujours très sollicités. Eh voilà comment le moral chute un peu plus encore. La balance me rappelle les crises passées et je peux même mesurer chacune d’elles. Celle d’hier soir me vaut x kilos ce matin, la culpabilité, la honte me rongent. Et dire que je viens d’aggraver mon cas. Je n’ose pas croiser mon regard dans le miroir. Je scrute chacune des parties de mon corps. Je le connais par cœur, aucune transformation, déformation ne m’échappe. A quoi bon prendre ensuite soin de ce corps que je déteste. Négligence totale.

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Quelque fois il faut sortir de chez soi. J’ai le sentiment d’être dévisagée, d’être démasquée par chacune des personnes qui me croise. L’hypermarché, je le connais par cœur, chaque rayon, chaque étagère. Mon panier se remplit petit à petit. Je ne me rends compte de mes achats qu’une fois arrivé le moment d’exposer mes articles sur le tapis de caisse. Là encore, la honte. J’aligne les paquets de gâteaux sous l’œil inquisiteur de la caissière et de la cliente suivante. Je baisse le regard. Le tapis n’avance pas assez vite pour mettre fin au supplice. La note à régler, autre étape douloureuse. Autant d’argent dépensé pour en faire ce que j’en fait, j’ai honte.De retour chez moi, c’est l’heure du déjeuner. Mais là non, je ne me fais pas avoir, malgré tout ce que je viens d’acquérir je vais réussir à ne presque rien manger. Le piège. Je me fais avoir tous les jours mais ça ne me sert pas de leçon. En effet, je tiendrai finalement très peu de temps avant de reprendre place dans ma cuisine pour la deuxième crise de la journée. Même déroulement à peu de choses près. Et même issue. Finalement épuisée je ne ferai rien de mon après-midi. Je serai montée à plusieurs reprises sur ma balance, juste pour vérifier, pour compter, pour me rajouter un poids moral au poids physique. Ah si, j’allais oublier, mon carnet alimentaire. Quel enfer. Tout répertorier. Humiliation. Je ne noterai pas tout. J’ai trop honte... La crise de larmes succède irrémédiablement, je ne m’en sortirai pas. Je me dégoûte tellement que je pense à nouveau à manger, comme pour m’achever, faire un pas de plus vers la destruction. C’est maintenant l’heure du retour de mon homme…je ne sais même pas ce que je vais lui préparer à manger. Je me rends compte que je n’ai pas fait de courses pour lui. Je n’ai pas acheté de quoi lui faire un repas structuré, équilibré. Je ne suis même pas capable de ça. Il n’est pas exigeant il se contente de ce qu’il reste et je lis dans son regard qu’il a compris le déroulement de ma journée. Il ne dira rien sur le fait que je dîne ou pas avec lui. Mon regard sera fuyant pour le reste de la soirée. Cette soirée que je trouverai interminable. Je me coucherai en faisant le bilan de ma journée. Si vous avez suivi vous verrez que tout n’aura finalement tourné qu’autour de la « bouffe ». Relisez si vous le souhaitez, vous verrez que je n’ai fait que manger. Je me coucherai avec de grandes résolutions, comme tous les soirs, mais je sais déjà que je ne les tiendrai pas et ça m’angoisse. Pour finir je rêverai peut-être de « bouffe »…

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